Il n’est pas aisé pour le lecteur d’atteindre l’intimité, de percevoir la personne de l’auteur au travers de son œuvre, quand bien même celle-ci serait autobiographique ou épistolaire : « toute narration est fiction », disait Umberto Eco, et jamais nous ne sommes à l’abri d’une recréation, volontaire ou non, d’un créateur qui parlerait de lui-même.
Entrevoir l’individu dissimulé derrière l’auteur, néanmoins, n’est pas impossible ; cela requiert des artifices. Le témoignage en est un, l’analyse fine un autre. Aussi n’est-il pas inutile de lire en parallèle les mémoires – faute de terme plus approprié – qu’offrit Jean Lambert, fenêtre sur la personnalité de son beau-père, un André Gide familial et familier, et les actes de colloque aux angles d’approche multiples dédiés à la notion d’écriture de soi dans l’œuvre de l’auteur.
Ainsi d’ouvrent à nous deux manières d’aborder l’homme André Gide : par le quotidien inexprimé dans son œuvre, hors et en-deçà de l’acte littéraire, et par l’étude postérieure, destinée à décoder, explorer ce que la narration révèle de son démiurge, parfois à son insu.