La question du travail, soulevée par les féministes dès le début du mouvement des femmes, s'est d'abord posée en termes de nécessité politique : leur production gratuite dans la sphère domestique. À partir de cette énonciation première, les chercheuses féministes ont pu montrer l'articulation de la division sexuelle du travail salarié avec les tâches traditionnellement dévolues aux femmes, et ses répercussions sur leurs conditions de travail, leur qualification, leur promotion et leurs salaires ; analyser les procédures par lesquelles les femmes sont assignées à la maternité et au mariage, tant par les États qu'à travers les discours idéologiques ; lever le silence sur leurs luttes et leurs résistances, et sur les oppositions auxquelles elles se sont heurtées dans le mouvement ouvrier. La mise en perspective économique de l'oppression des femmes s'inscrit donc dans un projet de dénonciation, mais elle est aussi porteuse de bouleversements théoriques dans le champ scientifique, et fondatrice de la conception des rapports de genre en termes de lutte des sexes. Elle est, par là même, centrale dans l'élaboration d'une pensée féministe radicale.