L'Allemand-Français, juif-chrétien, héros lamentable de cette histoire, pervers léger, cervelle enfiévrée et ridicule, vit aux frais de la princesse dans un orphelinat de banlieue. À vingt ans passés, « vierge mais non pas chaste », Jean-Jacques Rousseau à la manque, il ne rêve que d'être corrigé au fouet et d'accéder aux gloires archéologiques ou universitaires. Ce mélange de prétention et de naïveté, de vie et d'ingénuité le voue à toutes sortes d'aventures plus risibles et cocasses les unes que les autres. Bien malgré lui, le personnage adolescent de ce roman est l'incarnation de la contestation : il est à ce point dérisoire qu'il dégrade et compromet tout ce qui l'entoure. On éprouve en présence de cet indiscret encombrant une gêne profonde : il est l'inavouable, la honte secrète brandie à tous les vents et on sort de là avec l'envie de le prendre à bras-le-corps et de faire passer un mauvais quart d'heure à ce Don Quichotte à l'âme courte.
Auteur d'essais et de récits, dont Un Jardin en Allemagne, La Forêt interrompue ou La Traversée des fleuves, traducteur de Nietzsche, de Kafka et de Peter Handke en particulier, Georges-Arthur Goldschmidt s'est vu décerner le Prix France Culture 2004 pour "Le Poing dans la bouche" et le Prix Breitbach 2005 pour l'ensemble de son oeuvre. L'Empan et Le Fidibus, les deux volumes de la chronique Un corps dérisoire, parus initialement en 1971 et 1972, furent ses premiers textes romanesques. La présente réédition est accompagnée d'un entretien inédit avec l'auteur – mise en perspective aujourd'hui des premières expérimentations autofictionnelles d'hier.