L'écriture automatique, ce fut au temps du Manifeste de Breton la définition même du surréalisme : un geste fondateur, mais qui très vite se disperse et se renie. Que reste-t-il des « milliers de cahiers » qui n'ont pas eu d'écho ? Comment Aragon, Éluard ou Queneau mettaient-ils en œuvre le « principe » proclamé par Breton ? N'y a-t-il d'autre histoire de l'automatisme que celle d'une « infortune continue » ? En lisant « Poisson soluble », en débrouillant les écheveaux d'Aragon, en décrivant les modes de collaboration au sein du clan surréaliste, on fait surgir des phénomènes que la version des faits donnée par Breton simplifiait ou occultait. On pénètre aussi dans un univers pittoresque et bouffon, mais dont les ruses ne nous sont pas étrangères : car bien après son heure l'automatisme surréaliste continue de « cheminer sous roche » dans notre conscience du langage et notre regard sur les choses. À nous d'en suivre le fil conducteur, comme celui qui tient ensemble un grand poème :
IL Y AURA TOUJOURS UNE PELLE AU VENT DANS LES SABLES DU RÊVE
Michel Murat est professeur à l'Université du Maine. Spécialiste de Julien Gracq à qui il a consacré sa thèse et une monographie d'ensemble (Belfond, 1992), il a aussi écrit un livre sur Robert Desnos (Corti, 1988).
Marie-Paule Berranger enseigne à l'Université de Paris X. Elle s'intéresse aux jeux de langage et à la poésie contemporaine : Dépaysement de l'aphorisme (Corti, 1988), Poésie en jeu (Pierre Borda, 1989). Leur travail commun s'inscrit dans les activités de l'équipe « Champs des activités surréalistes » du CNRS.